Le début d’une légende sur les bords de la Garonne
Avant de devenir l’icône mondiale que l’on connaît, couronnée de la Coupe du Monde 1998 et triple vainqueur de la Ligue des Champions comme entraîneur, Zinedine Zidane a fait ses classes dans le football français. Mais c’est à Bordeaux, sur la pelouse du Parc Lescure, que l’étincelle s’est vraiment allumée.
Quand il signe aux Girondins de Bordeaux à l’été 1992, en provenance de l’AS Cannes, Zizou n’est encore qu’un jeune meneur de jeu prometteur, discret, au regard timide et déjà doté d’une vision du jeu hors normes. Pourtant, peu de supporters bordelais se doutaient à l’époque qu’ils allaient assister, pendant quatre saisons, à l’éclosion d’un des plus grands joueurs de l’histoire du football.
L’arrivée discrète d’un futur géant
Oui, vous avez bien lu. Zidane n’a pas débarqué à Bordeaux sous une pluie de projecteurs. À l’époque, les Girondins cherchent à se reconstruire, et c’est Rolland Courbis, alors entraîneur du club, qui flaire le bon coup. Il repère chez le jeune Zinedine une intelligence de jeu rare, une aisance balle au pied qu’on ne croise pas tous les jours dans l’Hexagone.
Sa première saison (1992-1993) reste sobre côté statistiques — 3 buts en 34 rencontres — mais Zizou pose déjà les jalons : passes millimétrées, contrôle orienté déroutant, et ce fameux coup d’œil qui fera sa signature. Le public bordelais commence à tendre l’oreille — et les défenseurs à tendre les mollets !
Un trio magique : Zidane, Dugarry et Lizarazu
Bordeaux se taille peu à peu une vraie identité grâce à un trio d’or qui fera les beaux jours du foot français : Zinedine Zidane, Christophe Dugarry et Bixente Lizarazu. Trois talents nés les uns pour les autres, comme les trois branches d’un trident fait pour couper les défenses adverses à la lame bien affûtée.
Ce trio-là, c’est plus qu’un atout sur le terrain, c’est toute une génération, toute une philosophie de jeu : technique, fluide, rapide. Le genre de football qui donne envie de venir au stade rien que pour voir un contrôle orienté ou une passe aveugle.
Et Dieu que le ciel bordelais s’en est réjoui ! Les Girondins atteignent leur apogée européenne en 1995-1996. Si vous étiez là, vous vous souvenez sûrement de cette campagne européenne inoubliable.
L’épopée en Coupe UEFA : le tremplin européen de Zidane
La saison 1995-1996 restera sans doute comme l’un des chapitres les plus épiques de l’histoire moderne des Girondins. Oui, à cette époque-là, Bordeaux joue la Coupe UEFA… et ne s’y contente pas de faire tapisserie.
Bordeaux détrône successivement le Real Betis, le Milan AC et le Slavia Prague, pour atteindre la finale contre le Bayern Munich. L’Europe entière découvre alors ce Zidane calme en apparence, mais tranchant comme une lame sur le terrain.
Qui aurait pu oublier ce superbe but du droit contre le Milan AC en quart de finale retour ? Une frappe limpide, des 20 mètres, offerte sur un plateau à toute la France du football — et surtout aux recruteurs d’Europe.
Certes, Bordeaux perdra la finale face au Bayern Munich, mais cette campagne laissera une trace impérissable dans les mémoires bordelaises. Et pour Zidane, c’est le début de la fin de sa parenthèse girondine.
Au revoir Lescure, bonjour Turin
À l’été 1996, Zinedine Zidane quitte Bordeaux pour la Juventus de Turin. Le club italien a eu le nez creux : ses prouesses européennes n’étaient pas passées inaperçues. Pour 3 millions d’euros – une bouchée de pain quand on y repense – la Juve récupère un futur Ballon d’Or.
Ce départ crée une déchirure chez tous les amoureux du club. Mais difficile d’en vouloir à un prodige qui a tant donné à Bordeaux. Zidane n’a pas seulement mis du génie dans les crampons. Il a aussi porté haut les couleurs des Girondins sur la scène européenne.
Le Parc Lescure, rebaptisé Matmut Atlantique depuis, aura vu passer d’innombrables joueurs, mais peu peuvent prétendre avoir laissé une empreinte aussi indélébile que Zizou.
Une influence marquante sur la jeunesse girondine
Zidane n’a pas seulement marqué les résultats du club. Il a aussi façonné une vision du jeu qui a inspiré une génération entière de joueurs formés au Haillan. Son profil de meneur de jeu élégant et précis est devenu une référence.
On raconte que certains jeunes du centre de formation se chamaillaient à l’époque pour porter le même numéro que Zidane lors des entraînements. Ah, jouer « comme Zizou », voilà un rêve qui animait les terrains du Haillan jusqu’à la tombée de la nuit.
Encore aujourd’hui, dans les travées du stade, on entend des supporters plus anciens parler de ce contrôle sublime contre le PSG ou de ce lob inspiré contre Caen. On ne parle pas seulement de buts, mais d’art. De gestes.
Et si Zizou était resté ?
Forcément, la question taraude les plus nostalgiques. Que se serait-il passé si Zinedine Zidane était resté une saison de plus ? Le club aurait-il soulevé des trophées nationaux ? L’histoire aurait-elle été différente ?
Mais comme souvent avec les légendes, c’est aussi la brièveté de leur passage qui rend leur souvenir plus précieux. Zidane a illuminé le ciel bordelais pendant quatre saisons. Assez pour créer des souvenirs éternels, sans jamais avoir besoin d’en faire trop.
Un amour réciproque
Lors de ses déclarations publiques, Zidane n’a jamais oublié Bordeaux. Oui, il est Marseillais de naissance, Madrilène de cœur pour certains, mais Bordelais à jamais pour ceux qui ont suivi sa métamorphose de talent brut en maestro.
En 2016, à la question d’un journaliste qui lui demandait quel club l’avait « fait homme », il a répondu sans détour : « Bordeaux m’a beaucoup apporté. C’est là que j’ai pris mon envol ». Tout est dit.
Et si vous passez un jour du côté du Haillan, prenez le temps de parler à un éducateur, un supporter de longue date ou même un agent technique. Tous auront une anecdote sur le jeune Zizou. Un sourire, un dribble, une passe lumineuse à l’entraînement. Les souvenirs sont partout, gravés dans la mémoire collective du club.
Zidane à Bordeaux en quelques faits marquants
- Arrivée : Été 1992 en provenance de l’AS Cannes
- Nombre de matchs avec les Girondins : 174 toutes compétitions confondues
- Buts inscrits : 39 buts
- Prestations notables : Campagne UEFA 1995-1996, notamment face au Milan AC
- Départ : Été 1996 pour la Juventus Turin
- Coéquipiers emblématiques : Christophe Dugarry, Bixente Lizarazu, Johan Micoud
Un héritage toujours vivant chez les supporters
Les souvenirs d’un Zidane en bordelais, crampons noirs et regard concentré, font partie de l’ADN des Girondins. Dans les discussions autour d’un verre dans les tribunes ou sur les bancs du stade Chaban-Delmas, son nom reste synonyme de beauté du jeu, de pureté du geste.
Les jeunes supporters, qui ne l’ont pas vu joué en marine et blanc, l’ont vu et revu en vidéo. Il continue de faire rêver, d’enseigner le beau football à travers ses actions passées. Un modèle du genre, un totem dans l’histoire des Girondins.
Et après tout, n’est-ce pas là la marque des plus grands ? Être parti depuis près de trente ans… et laisser derrière soi une légende vivace ?